Cocaïne, cannabis, caféine ou calva : ils se dopent pour bosser

Comment travailler plus pour gagner plus ou ne pas se faire virer ? Comment ingurgiter une tonne de cours en deux semaines avant les partiels ? Comment supporter un boulot merdique et répétitif ou des enfants déchaînés dans une classe difficile ?

Les drogues légales et illicites sont souvent utilisées pour supporter la charge du travail. Florilège de témoignages et de chiffres inquiétants, secteur par secteur.

Un soir, j’attendais un pote dans la brasserie où il travaillait. Connaissant le patron, il me convie à sa table pour partager une bouteille de champ’, déjà bien mûr et couineur.

« J’ai six brasseries touristiques avec service en continu de 11 heures à minuit, mon personnel magouille la caisse pour se payer de la coke.

Avant, c’était tranquille, le toubib prescrivait des amphétamines pour tenir le rythme. Maintenant qu’il n’y en a plus, ils ont besoin de beaucoup plus d’argent. C’est la merde. »

Effectivement, mon copain trichait sur les tickets et consacrait ses pourliches à la coke. J’ai connu le monde de la brasserie/traiteur sous speed dans mes premiers boulots au début des années 80 : calva dans les cafés, ballons de blanc à la volée et grosse dose de Captagon.

Certains ajoutaient une injection de Palfium pour masquer leurs douleurs chroniques ou gazer plus, une sorte de pot belge. Les anciens évoquaient souvent les cafetières du personnel d’antan chargées au « Tonton » (Maxiton) ou au « Lili » (Lidépran) par le patron.

Aujourd’hui, d’après le baromètre santé INPES 2010, 9,2% des salariés du secteur hébergement/restauration ont expérimenté la coke, et 7,9% le speed. C’est bien plus que mon secteur information/communication à la réputation poudrée (6,9% et 5,5%) ou que la moyenne nationale (3,8% et 3,3%).

Christian (tous les prénoms de ce texte ont été modifiés), 40 ans, est architecte et fêtard. Il utilisait la coke en série de minilignes pour éliminer la fatigue et stimuler l’intellect pendant la phase finale de conception de ses projets, avant leur présentation, la fameuse « charrette » de trois, quatre jours ou plus.

En temps normal, c’était plutôt bières et pétards, parfois dès la pause déjeuner.

« La bonne haze et la bière, c’est stimulant mais t’as une sale gueule, les yeux rouges, l’odeur qui grille et t’es rétamé pour longtemps si tu dépasses la dose, pas très pro. »

C’est un cocktail classique dans le bâtiment. Ivresse dans l’année : 33%. Cannabis dans l’année : 13%. Du coup, il a commencé à prendre de la coke tout le temps, de la dose homéopathique dans la matinée à l’autoroute dans les soirées.

« Je gagne entre 6 000 et 10 000 euros par mois, j’en claque au moins 1 600 en produit, 40 grammes à 400 euros les 10, le caillou-test fait presque 1 gramme (soit une pureté d’environ 60-70%). »

Aux dernières nouvelles, il avait calmé sa consommation après un séjour dans une fameuse clinique suisse au bord d’un lac.

Les profs sont soumis à un stress énorme, surtout dans les ZEP. J’en connais un wagon qui fument joint sur joint le soir pour évacuer, et parfois même avant les cours. Henry, 50 ans, prof de techno, doit sa carrière à cette substance :

« Après une phase alcoolique, à boire de la bière le matin pour ne plus trembler autant d’addiction que de trouille, je suis devenu un excellent prof en fumant 300 à 400 euros de shit par mois pendant dix ans.

J’étais tout le temps sous l’effet du produit pour supporter la pression, pourtant je suis maintenant un référent dans mon académie. »

Couverture du journal du numéro 51 du journal d’Asud

Le cannabis est bien une problématique pour toute l’Education nationale, Vincent Peillon est tout à fait légitime sur le sujet.

« Mon dealer est tombé, je ne me voyais pas aller à la cité ou demander à mes élèves.

J’ai arrêté sans trop de peine, mais j’ai beaucoup plus de douleurs, de stress et d’insomnie, surtout sans Valium, et je rebois un peu d’alcool. »

Alors, prendre du cannabis peut-il être considéré comme du dopage, au boulot ou à l’école ?

Au lycée, je fuyais systématiquement les cours pour aller boire des bières et jouer au flipper si je n’avais pas fumé avant.

Certes, la concentration est moins bonne et la mémorisation aussi, donc difficile de parler de dopage. Mais c’est aussi mieux que pas de performance du tout…

« The show must go on »

Le secteur artistique est le plus gros consommateur de cannabis (17% dans l’année) et de coke (9,8% d’expérimentateurs). Est-ce du dopage ? Laissons Johnny Halliday répondre :

« Je fais un métier qui repose sur l’angoisse. On commence par un verre pour se donner confiance, on finit par la bouteille. La drogue, c’est la même chose. » (Le Monde, 7 juillet 1991)

Dans une nouvelle interview au Monde du 7 janvier 1998, Johnny avoue :

« La cocaïne, j’en ai pris en tombant du lit. Maintenant, j’en prends pour travailler, relancer la machine. Je n’en suis pas fier, c’est ainsi, c’est tout. »

En voilà au moins un qui n’a pas pris de la coke à l’insu de son plein gré. Dans la même interview, il qualifiait le cannabis de carburant de base de ses musiciens. Elvis les aurait tous balancés au Narcotics et à Nixon, pourtant il était lui-même pété aux doses d’un cheval de course préparé à l’ancienne.

Vente à l’abattage

En 2011, Rue89 avait publié des témoignages et des analyses sur ce sujet. Je connais très bien le Paul de l’article, et ses potes encore dans la vente en grandes surfaces. L’usage du speed, issu des teufs, est toujours très important, surtout lorsqu’arrive une période de bourre comme les soldes, une grosse promo ou Noël.

Pareil pour la coke chez les vendeurs de bagnoles. Fabien, 37 ans, raconte :

« Dans les derniers jours de la prime à la casse ou d’une grosse action promo, c’est de la folie, il y a dix clients qui attendent pour essayer des caisses ou signer des contrats, la concurrence est rude, il y a plein de garages dans la zone commerciale, il faut “planter” vite et bien.

Je suis toujours enrhumé ces jours-là. En fait, je crame un gramme de C avec mon spray nasal. »

Dans un sondage Ifop réalisé en 2006, à la question « Que prenez-vous pour tenir le coup au travail dans les moments difficiles ? », les salariés sont 3% à déclarer cannabis, haschich ou cocaïne, 10% recourent à des antidépresseurs, 12% à des somnifères, 56% à des stimulants sur-vitaminés et/ou caféinés.

Dans un article du Monde du 13 avril 2012, le docteur Hautefeuille note également l’usage de DHEA, créatine, méthamphétamine, mais aussi de produits licites comme le Guronsan ou la caféine.

« J’ai vu des patients qui prenaient 12 à 15 gélules de caféine par jour, avec l’équivalent de 4 à 5 expressos dans une gélule. Et les effets secondaires sont importants : tremblements, nausées, tachycardie. »

La consommation de produits stimulants peut alors être couplée à des produits anxiolytiques ou hypnotiques, comme le constate dans le même article François Beck, de l’INPES :

« [Il faut en prendre] pour la descente, ou pour trouver le sommeil parce que la journée a été stressante et que l’on a besoin de “performer” le lendemain ».

Drogues d’assistante de direction

Le recoupement du sondage Ifop avec les chiffres de l’INPES donne une image de l’usage croisé d’alcool et de benzos (10%). La consommation d’alcool sur le lieu de travail (hors repas et pots) concerne 16% des actifs occupés (19% des hommes et 10% des femmes).

J’ai souvent entendu des femmes soumises à une grosse pression, entre le téléphone, les mails, les autres employés et le patron stressé, avouer un ou deux petits verres en douce et un demi Lexomil pour finir la journée plus détendue et efficace.

Françoise, 33 ans, assistante du DG d’une entreprise du CAC 40 :

« J’aime bien le champagne et le Lexo, je tape régulièrement dans la réserve pour les beaux contrats et les pots.

Cela te fait des bulles dans la tête, tout paraît plus léger, j’ai la tchatche pour affronter la stagiaire débile perdue dans un dossier, le directeur commercial qui veut me coincer aux chiottes, mon boss qui a trouvé ma minuscule erreur du jour et va criser. »

Toujours d’après l’INPES, en 2010, plus du tiers des fumeurs de tabac réguliers, 9,3% des consommateurs d’alcool et 13% des consommateurs de cannabis déclarent avoir augmenté leurs consommations au cours des douze derniers mois, du fait de problèmes liés à leur travail ou à leur situation professionnelle.

De nombreuses professions soumises à de fortes exigences de résultats connaissent une augmentation du « poly-usage » pour contrer le stress et les coups de surchauffe, comme les marins-pêcheurs (beaucoup de speedball, d’après des amis bretons), les traders, les avocats d’affaires.

Agnès, collaboratrice d’un cabinet d’affaires parisien explique dans Swaps (numéro 56) :

« Nous travaillons dans un milieu où tout le monde picole car c’est très masculin et toléré. […] Quant à la cocaïne, effectivement, elle est très répandue dans le métier. Elle permet de rester en forme et pour certains, de faire comme s’ils avaient une vraie vie, alors qu’ils passent leurs jours et leurs nuits au bureau. »

Aucun milieu professionnel n’est décidément épargné par la recherche de performance et de résistance à la pression.

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Alcool, cocaïne, caféine : que contient vraiment le Coca-Cola ?

image ganja canabis

Alcool, cocaïne, caféine : que contient vraiment le Coca-Cola ?

lesinrocks.com

Un monde sans drogues n’existe pas

27/06/2012
Bouteilles de Coca-Cola dans une usine aux Etats-Unis (Reuters)
Bouteilles de Coca-Cola dans une usine aux Etats-Unis (Reuters)

Ainsi donc, le Coca-Cola (comme beaucoup d’autres colas) contient d’infimes traces d’alcool. La polémique n’est pas nouvelle, mais elle a rebondi ce mercredi avec la publication par 60 millions de consommateurs d’une enquête intitulée : “Coca, Pepsi et autres colas : ces ingrédients qu’on vous cache”. Entre autres conclusions, celle-ci fait polémique:

“Pour clore une rumeur persistante sur la présence d’alcool dans les colas, les ingénieurs de 60 Millions ont réalisé leurs propres dosages. Résultat ? Près de la moitié des colas testés contiennent de l’alcool – à des doses cependant très faibles (moins de 10 mg d’éthanol par litre, soit près de 0,001 %).”

Des quantités négligeables donc, puisque l’Etat considère qu’une boisson est alcoolisée lorsqu’elle contient plus de 1,2% d’alcool. Par ailleurs, Coca-Cola a toujours reconnu que ses produits contenaient des traces d’alcool liées à la présence de certains fruits et arômes. Une transparence qui n’est pas de mise pour tous les ingrédients de la formule -toujours secrète-, notamment les feuilles de coca à propos desquelles le fabriquant n’est pas particulièrement à l’aise. Petit retour en arrière.

Tout démarre en 1885, lorsqu’un ancien soldat confédéré, le lieutenant John Pemberton, pharmacien dans le civil et, dit-on, morphinomane à cause d’une mauvaise blessure de guerre, met sur le marché son Pemberton French Wine Coca. La recette n’est que la copie du blockbuster de l’époque: le vin Mariani. Une décoction de feuilles de coca et de Bordeaux inventée en France et très appréciée du pape Léon XIII ou de la reine Victoria. Le Cocao-Cola est alors bien une boisson alcoolisée et psychotrope mais considérée comme un médicament miracle, notamment pour la lutter contre la dyspepsie (d’où le nom du principal concurrent apparu en 1893 : Pepsi).

Mais en 1886, le conseil municipal d’Atlanta, où est implanté Pemberton, décide de la prohibition de l’alcool. Qu’à cela ne tienne: le pharmacien retire le vin de sa formule tout en conservant la coca et la noix de cola. La formule fait mouche mais Pemberton n’en profite pas puisqu’il meurt deux ans plus tard. La firme, elle, lui survit.

A la fin du siècle, c’est au tour de la cocaïne, alors en vente libre, de faire l’objet de restrictions dans une Amérique de plus en plus hygiéniste. En 1901, la ville d’Atlanta impose la vente sur ordonnance de ce produit qui commence à avoir mauvaise presse, associé à la vague de criminalité que connaît le Sud du pays.

Les héritiers de Pemberton tranchent alors la coca en deux. Ils décident de conserver la feuille qui a fait la réputation de leur boisson, mais d’en retirer préalablement le principal agent actif: la cocaïne, naturellement présente dans le végétal. Un contrat est passé avec le laboratoire Schaefer Alkaloïd Works du New Jersey pour procéder à cette décocaïnisation. Le Coca-Cola quitte alors les rayons des pharmacies pour devenir la simple boisson rafraichissante que l’on connaît aujourd’hui.

Mais en 1961, la feuille de coca est interdite dans le monde entier suite aux pressions des Etats-Unis. Une interdiction qui ne perturba pas les juteuses affaires de la firme d’Atlanta. En effet, parmi les seuls laboratoires à pouvoir continuer à importer des feuilles aux Etats-Unis figure Schaefer Alkaloïd Works, dont le client quasi exclusif est Coca-Cola. La cocaïne extraite, elle, sert à la recherche médicale. Un commerce qui se fît dans la plus grande discrétion jusqu’à la fin des années 90 où la presse s’intéressa à l’affaire.

Régulièrement interrogée sur la présence de cocaïne dans sa boisson, la firme répond invariablement qu’elle n’achète pas elle-même de feuilles de coca (ce qui est vrai puisqu’elle passe par un intermédiaire qui lui livre un produit chimique transformé) et qu’elle n’a jamais ajouté de cocaïne dans sa formule (ce qui est également vrai puisque la cocaïne était à l’origine naturellement présente dans les feuilles). Reste que Coca-Cola est, aujourd’hui encore, le principal importateur mondial de feuilles de coca, comme l’ont confirmé les autorités péruviennes et boliviennes, où sont cultivées les sulfureuses feuilles.

Enfin, la caféine, naturellement contenue dans les noix de kola, fit elle aussi l’objet de débats au début du siècle. En 1911, le gouvernement fédéral intenta ainsi une action en justice pour forcer Coca-Cola à se passer de caféine, et donc de noix de kola. En vain. Mais l’année suivante, le Pure food and drugs act fut tout de même modifié pour obliger les fabricants de produits contenant de la caféine à le préciser sur l’étiquette

De la caféine donc, de la coca mais pas de cocaïne. Quant à l’alcool, selon l’étude de 60 millions de consommateurs, vous pouvez toujours l’éviter en buvant d’autres colas puisque 9 des 19 marques testées n’en contenaient pas (Carrefour classic et light, Super U, Auchan, Cora, Casino, Leader Price, U-Man Cola).

Arnaud Aubron

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